Le monde en feu, le pillage du bassin forestier du Congo continu
Brazzaville, capitale du Congo, va accueillir le premier sommet des trois grands bassins des forêts tropicales du 26 au 28 octobre 2023. Il s'agit du bassin du Congo, du bassin de l'Amazonie et du bassin de Bornéo-Mékong. Ces trois bassins détiennent 80% de forêts tropicales mondiales et ⅔ de la biodiversité sur la terre. La terre est en feu. Il y a surchauffe. Le Secrétaire général de l’ONU, Monsieur Antonio Guterres, dit lui-même : L’ère du réchauffement climatique est terminée. L’ère de l’ébullition mondiale a commencé. Et nul ne s’inquiète du pillage par les entreprises occidentales des forêts du bassin du Congo. Alors que ce bassin forestier abrite la plus grande tourbière tropicale au monde, les tourbières du Congo.
Philippe Assompi
8/18/20235 min read
Un cercle vicieux du changement climatique
Il est préoccupant de constater que les feux de forêt ont été multipliés par deux dans le monde en raison du changement climatique. Le dérèglement du climat a créé des conditions plus propices à l'éclosion et à la propagation des incendies de forêt, causant des dommages considérables à la biodiversité, à l'écosystème et aux communautés humaines qui dépendent des forêts pour leur subsistance.
Le Portugal, l’Algérie, l’Espagne, la France, la Grèce, Hawaï, ont tous été touchés par des incendies de forêt dévastatrices cette année, et cela fait partie d'une tendance mondiale préoccupante.
Quant au Canada, il a connu une augmentation considérable de la superficie des forêts brûlées, atteignant 10 millions d'hectares. Cela aura des conséquences majeures sur la biodiversité, l'air, l'eau et les émissions de gaz à effet de serre, contribuant ainsi au cercle vicieux du changement climatique.
L’ère de l’ébullition mondiale a commencé
L’ère du réchauffement climatique est terminée, place à l’ère de l’ébullition mondiale, s'est inquiété le Secrétaire général de l’ONU, Monsieur Antonio Guterres.
Le bassin du Congo abrite l'une des plus grandes forêts tropicales du monde et joue un rôle crucial dans la conservation de la biodiversité mondiale et le stockage du carbone. À savoir que c’est dans ce bassin que se trouve la plus grande tourbière tropicale au monde. Laquelle séquestre trente milliards de tonne de carbone.
Le paradoxe du pompier pyromane
Le bassin du Congo se trouve en Afrique centrale. C’est une des zones où on retrouve les pays les plus corrompus dans le monde. Un coup d’œil sur le site de Transparency International, Indices de perception de la corruption, permet d'en savoir davantage. Une corruption endémique instaurée par les puissances coloniales pour faire main basse sur les ressources de ces pays, les bois rares y compris. À la conférence de Berlin, les États-Unis avaient proposé le principe d’une « neutralisation » du bassin du Congo. Ils se heurtèrent à l’opposition de Léopold II, ainsi que de la France et du Portugal, détenteurs de larges portions de ce territoire. Bien qu’on note aujourd’hui une percée de la Chine, la Russie, la Turquie et bien d’autres dans cette partie du monde, il n’en demeure pas moins que ce sont des entreprises belges et françaises qui profitent du chaos ; coupes illégales, grumes maquillées, permis artisanaux détournés, qu’engendre la corruption dans ces pays. Contrairement au bassin amazonien où la déforestation est du fait des entreprises locales, au centre de l’Afrique ce sont les européens qui en profitent. Le Règlement Bois de l’Union Européenne (EUTR) c’est de la poudre de perlimpinpin, toutes les instances de décision de l’UE à ce sujet étant des nids à lobbying. Le fumant dossier du Qatargate illustre fort bien cette triste réalité. D’ailleurs selon 20 Minutes, Greenpeace Afrique a récemment dénoncé le débarquement légal à Anvers d'une cargaison d'Afromosia, un autre bois rare utilisé en décoration dont l'origine était illégale, selon l'ONG. « La Belgique a placé les intérêts des entreprises de bois au-dessus de la protection des forêts du Congo et des populations qui en dépendent pour leur subsistance ». Ce qui est vrai pour la Belgique l’est aussi pour la France. Sinon pourquoi la France qui dispose des satellites, les moyens d’observation moderne, ne les met-elle pas au service de la cause climatique ? L’Élysée doit s’impliquer davantage. D’autre part le « en même temps » est un vision incompatible avec les exigences environnementales. La nature n’aime pas l’hypocrisie.
Le secret de polichinelle
Tout le monde sait à commencer par l’ONU que la corruption au centre de l’Afrique est entretenue par les anciennes puissances coloniales mais nul n’en parle. C’est l’omerta le plus absolu. Circulez, il n’y a rien voir. Il ne faut pas oublier que l’expansion fulgurante chinoise en Afrique a été possible grâce aux carnets d’adresse des tenants de la FrançAfrique. L’exemple le plus criant est celui de Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier Ministre de la France et aujourd’hui VRP de la Chine.
Un moratoire s’impose
Le premier sommet des trois grands bassins des forêts tropicales va se tenir au moment où des organisations de la société civile, au premier chef desquelles l’OCDH, du pays hôte viennent de déposer une plainte contre X pour dénoncer le détournement de 14 000 milliards de francs CFA (environ 25 milliards de dollars). À cela s’ajoute l’affaire des biens mal acquis dont aujourd’hui se pose la question de la restitution. Des atteintes à la probité qui gangrènent toute la région. Cet héritage issu de la colonisation est la cause majeure qui entrave une gestion rationnelle des forêts du bassin du Congo. C’est pourquoi un moratoire s’impose. Ceci le temps que soit répertorié toutes les entreprises du bois qui exercent dans le bassin du Congo, identifier leurs nationalités et savoir qui fait quoi. L’objectif est de créer une base de données pour améliorer la traçabilité et lutter efficacement contre l'illégalité et la corruption. Un moratoire bien géré pourrait prendre en compte les besoins des populations locales tout en préservant les forêts.
La participation du Brésil, un espoir
Le Brésil participera du 26 au 28 octobre 2023 au sommet des trois grands bassins des forêts tropicales qui se tiendra au Congo. Il sera représenté par son Président dont on connait le franc-parler. Élu démocratiquement à trois reprises, Luiz Inacio Lula da Silva est l’antithèse de ses pairs qui gouvernent au centre de l’Afrique. C’est un homme d’état ayant des convictions aux antipodes de celles qui guident les décideurs politiques dans le bassin du Congo. Sa voix comptera à Brazzaville.
À la lumière du gigantisme des incendies cette année, particulièrement en Europe et en Amérique, si en plus on laissait sans réagir la gestion du bassin forestier du Congo minée par la corruption, il est fort probable que la planète soit irrespirable avant la moitié de ce siècle. Les plus fragiles, où qu’ils soient, seront les premières victimes. La multiplication des méga feux, des températures caniculaires et de la déforestation sauvage sont des éléments propices à créer un cocktail explosif pour une augmentation des niveaux de carbone dans l'atmosphère. Le Secrétaire Général de l’ONU doit s’inviter au sommet de Brazzaville pour que la question de la corruption soit traitée avec un accent particulier.
© Sauvons les tourbières du Congo 2024
Un artiste, une voix
Maître Gims, de son vrai nom Gandhi Djuna, est bien plus qu'un simple chanteur. Il est une figure emblématique de la culture urbaine, adulé par des millions de jeunes à travers le monde. Son influence est telle qu'un simple post sur les réseaux sociaux peut rapidement se transformer en un véritable phénomène de société. En appelant ses compatriotes à "se réveiller", Maître Gims a donné une voix à une jeunesse congolaise en quête d'un avenir meilleur.
Les deux Congo : une même histoire, des défis communs
La République démocratique du Congo et la République du Congo partagent une histoire commune, marquée par la colonisation, les indépendances tumultueuses et les conflits armés. Bien que séparés par une frontière artificielle, les deux pays restent profondément liés par des liens culturels, linguistiques et familiaux. Les congolais, qu'ils vivent à Kinshasa, à Brazzaville ou dans les capitales européennes, sont unis par une même identité.
Les tourbières du Congo : un patrimoine mondial à protéger
Outre leur héritage culturel commun, les deux Congo partagent un trésor naturel d'une importance mondiale : les tourbières du Congo. Ces vastes étendues de tourbières, situées deux tiers en République démocratique du Congo et le tiers restant en République du Congo, constituent le plus grand réservoir de carbone tropical au monde. Elles jouent un rôle crucial dans la régulation du climat et abritent une biodiversité exceptionnelle. La protection de ces écosystèmes est un enjeu majeur pour l'avenir de la planète et un motif d'union pour les congolais. La conservation desdites tourbières offre une opportunité unique de concilier protection de l'environnement et développement économique, en améliorant le bien-être des populations locales tout en contribuant à la lutte contre le changement climatique. Pour ce faire, seule une collaboration entre les gouvernements, les entreprises et les organisations de la société civile peut permettre de mobiliser des investissements importants pour la conservation des tourbières et le développement de projets socio-économiques. La mobilisation de la diaspora congolaise ngambo na ngambo autour de cette vision est ma cause depuis plus de six ans.
Des paroles aux actes : AGISSONS - Ko lamuka éssengui bossangani
Pour qu'une population se mobilise, un enjeu commun est essentiel. C'est ainsi qu'une prise de conscience collective peut émerger. Les tourbières du Congo représentent une opportunité pour les congolais de s'unir autour d'une cause partagée. Saisissons ensemble cette chance unique. Une simple recherche sur Google révèle les nombreux bénéfices qu'une collaboration entre la société civile, les organismes étatiques et les institutions internationales pourrait apporter aux congolais, notamment en matière d'amélioration des conditions de vie. N'attendons pas que les autres viennent faire pour nous. Ne soyons pas passifs : le monde appartient à ceux qui agissent. Notre destin est entre nos mains. Si cet article est largement diffusé, il aura un effet boule de neige, redonnera espoir à ceux qui en avaient perdu et attirera l'attention de personnalités influentes susceptibles de soutenir cette cause.
La diaspora congolaise : un levier pour le changement
La diaspora congolaise, fortement implantée en France et en Belgique, représente un potentiel considérable pour le développement de ces deux pays. La proximité géographique entre la Belgique et la France facilite les synergies et les mobilisations au sein de cette communauté. Les congolais de la diaspora sont souvent bien éduqués et occupent des postes à responsabilité dans leurs pays d'accueil. Parmi eux, on trouve des députés fédéraux élus en Belgique et en France, siégeant à l'Assemblée nationale. On y compte également des artistes, des intellectuels tels qu'Alain Mabanckou, ainsi que des sportifs de renom, dont le jeune prodige Victor Wembanyama, qui évolue en NBA. Ces femmes et ces hommes forment un potentiel humain exceptionnel, capable de porter une cause à un niveau supérieur.
Ngambo na Ngambo, je nous connais
Natif de Poto-Poto, j'ai vécu à Kinshasa, sur le Boulevard Kassavubu, pendant plus d'un an. J'appartiens à la même génération que Djuna Djanana, le père de Maître GIM’S. Bien que nous ne nous connaissions pas personnellement, nous avons partagé des amis communs dans le Paris des années 80. Parmi eux, je citerai feu Niarkos Mombélé, Jacques Moulélé et Mère Malou. Koko Waya et Evelyne Ngongolo "Mère Évé" peuvent en témoigner. Na za kulutu ya ba léki ébélé. Je connais les deux Congo. Tous ceux qui ont connu la Maison des Étudiants Congolais - la MEC, dans le troisième arrondissement de Paris le savent. Mon passé est le reflet de mon aptitude à rassembler, à fédérer. L’âge dans la tradition bantoue est une clé passe partout. Je suis déterminé à engager un dialogue constructif avec tous les congolais, qu'ils résident en Belgique, en France, et quels que soient leur parcours professionnel ou leur milieu social. Pour mobiliser, il faut sensibiliser, informer pour convaincre. Et le porte à porte permet d’instaurer un climat de confiance.
Le cri de ralliement de Gims a ouvert une brèche dans le mur de l'indifférence et de la résignation. Il a rappelé aux congolais du monde entier qu'ils partagent une histoire commune, un destin lié et des valeurs fondamentales. Pour que ce rêve d'unité devienne réalité, il est nécessaire de dépasser les clivages et de construire un projet de société inclusif et durable. La jeunesse congolaise, inspirée par des figures comme Maître Gims, a un rôle essentiel à jouer dans cette dynamique.
Philippe Assompi
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